Réservoir de talents

La Fédération Française de Baseball/Softball peut s’appuyer sur une délégation Amérique du Nord. Cette dernière se charge de recruter des joueuses et des joueurs sur le continent américain. Objectif : renforcer les rangs des équipes de France.Patrice Baudin, son fondateur et délégué général, revient sur son fonctionnement.

Quelle est l’histoire de la délégation Amérique du Nord ?

 

J’ai créé la délégation en 2011 juste avant le tournoi du World Baseball Classic, où participait alors l’équipe de France de baseball masculine. L’objectif de base était de trouver des joueurs en Amérique et qui pouvaient prétendre à l’obtention d’un passeport français. Français d’origine et ancien joueur, j’ai déménagé au Québec il y a 21 ans pour des raisons professionnelles. J’ai conservé des liens avec la fédération française. J’ai souhaité étoffer mon réseau pour donner un coup de main au baseball français. J’ai moi-même beaucoup reçu de ce sport et je voulais rendre la pareille.

 

Quel est le potentiel des joueuses et joueurs outre-Atlantique ?

 

La communauté française regroupe environ 400 000 personnes réparties entre le Canada, les USA et le Mexique. Il est fort possible que ces familles aient des enfants jouant actuellement au baseball. Ce chiffre est sous-estimé car ce sont seulement les Français enregistrés auprès de l’ambassade. La réalité est encore plus importante. Les Français présents en Amérique le sont depuis au moins une génération pour certains. Dans ce contexte, il y a forcément des jeunes joueurs et joueuses susceptibles d’obtenir la nationalité française. A l’heure actuelle, nous estimons à 300 le nombre de joueurs de baseball de bon niveau présents sur l’Amérique du Nord.

 

Quels critères doivent-ils remplir pour intégrer les équipes de France?

 

Le joueur ou la joueuse peut prétendre à la nationalité s’il y a mariage avec un Français d’origine. Le fait d’avoir un des parents né en France est également un critère de sélection. Nous avons l’exemple du manager des San Francisco Giants, Bruce Bochy. Né en 1955 près de Bordeaux, cet Américain a un fils désormais éligible pour le World Baseball Classic au sein de l’équipe de France. Nous travaillons actuellement à ce que tous les joueurs éligibles puissent obtenir leurs passeports français pour participer à la compétition en 2017. Les règles sont assez complexes.

 

Où en est la pratique féminine en matière de baseball et de softball ?

 

Le baseball féminin est encore limité car il y a peu de joueuses recensées en France mais aussi au Canada. Nous comptons néanmoins dans les rangs français, Mélissa Mayeux, une jeune joueuse qui a pu intégrer la sélection canadienne en 2013. Pour le softball, la fédération ne s’est jamais véritablement intéressée au potentiel des filles outre-Atlantique. Je poursuis néanmoins les démarches et je viens de créer le site baseballfrance.com, destiné au recrutement en softball et baseball. Pour le moment, les seuls contacts que j’ai pu avoir sont des hommes. J’ai l’impression que les filles sont moins en recherche sur le Web pour créer un réseau avec leurs racines françaises. Même au niveau de la fédération, les liens avec les joueuses américaines sont limités pour l’instant.

 

 

« Pas la même culture du jeu »

 

 

Y-a-t-il des différences de pratique entre le Canada et la France ?

 

Le softball au Canada est très développé mais il y a encore peu de joueuses à haut niveau, comparé aux USA. Rappelons que cette discipline peut être mixte, féminine ou masculine. De nombreux joueurs de baseball se mettent ainsi au softball et plus particulièrement au « slowpitch ». En France, nous avons de bonnes joueuses et de bons joueurs, tant en softball qu’en baseball, mais la grande différence avec le continent américain réside dans l’absence de culture du jeu. C’est un peu la même chose au Canada avec la pratique du football. Ici, les enfants reçoivent un gant de baseball ou de softball dès leur plus jeune âge. En France, ce sont les anciens joueurs qui initient leurs enfants mais la transmission est encore limitée. Aujourd’hui la situation évolue avec les matchs des équipes de France à l’international. C’est aussi un plus d’avoir Eric Gagné à la tête de l’équipe nationale de baseball. Ce Canadien nous apporte une visibilité nouvelle. La fédération souhaite rester dans le giron des clubs américains de Major League. C’est une vitrine incontournable.

 

Quels sont les objectifs de la fédération pour développer davantage le softball féminin ?

 

Nous allons redoubler d’efforts pour trouver des joueuses ici en Amérique. La fédération au travers de la direction technique nationale m’a passé un message clair. Le softball féminin reste une priorité. Il nous faut des joueuses à la double nationalité pour renforcer les équipes nationales et les clubs français durant les championnats. Une seconde phase de recrutement, avec une large campagne de communication, est en préparation. Ambassades, institutions françaises présentes en Amérique, Alliances françaises, réseau des professeurs de français, associations sportives, l’objectif est d’attirer des joueuses et de leur faire découvrir l’équipe de France.

 

Le pourquoi du comment

 

Patrice Baudin a joué au baseball, en équipe de France, de 1983 à 1993. L’homme a participé à plusieurs championnats d’Europe et a également suivi quatre ans de préparation olympique. « La vie m’a poussé à partir. J’ai rencontré ma femme au Québec par la suite. Quand je suis arrivé j’ai joué au plus haut niveau amateur senior canadien ». Le président de la Fédération, Didier Séminet ainsi que les membres du bureau sont des amis de longue date. « C’est pour cela que je me suis investi dans la délégation Amérique du Nord. La pratique du baseball et du softball était devenue catastrophique. Il y a avait 15 000 licenciés en France en 1993 et plus que 4 500 en 2010. J’ai eu du mal à y croire lorsque j’ai vu ces chiffres. Se dire qu’il y a vingt ans on était par exemple beaucoup plus forts que les Allemands en Europe ».